Mise au pointMise au point sur la maladie des anticorps anti-membrane basale glomérulaire ou syndrome de GoodpastureReview on anti-glomerular basement membrane disease or Goodpasture's syndrome
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Histoire et nomenclature
La première description de la maladie des anticorps (Ac) anti-membrane basale glomérulaire (anti-MBG) remonte à 1919. Ernest Goodpasture, médecin et anatomopathologiste américain, rapporte le cas d’un patient de 18 ans décédé d’un syndrome pneumo-rénal six semaines après une infection grippale au cours de la pandémie de 1918-1919 [1]. L’examen anatomopathologique post-mortem retrouvait un syndrome pneumo-rénal associant une hémorragie alvéolaire massive et une néphropathie glomérulaire avec
Physiopathologie
La cible antigénique principale des anticorps anti-MBG est le domaine non-collagène (NC1) de la chaîne α3 du collagène de type 4 (α3(IV)NC1) [6], [7], décrit comme « l’auto-antigène Goodpasture ». Sa distribution tissulaire est restreinte aux membranes basales des capillaires glomérulaires et alvéolaires expliquant le profil clinique de la maladie, mais aussi dans une moindre mesure, à l’œil, aux plexus choroïdes et à la cochlée.
Dans les années 1960, des expériences de transfert passif de la
Epidémiologie
La maladie des anticorps anti-MBG est une maladie rare touchant environ 1 individu par million d’habitants par an en Europe. L’estimation la plus précise provient d’une étude nationale irlandaise de 2016 identifiant tous les cas entre 2003 et 2014, relevant un taux, sensiblement plus élevé de 1,64 par million d’habitants par an [17].
Il s’agit d’une maladie bien décrite dans les populations caucasiennes et asiatiques, mais plus rare dans les populations africaines [18]. Il s’agit d’une maladie
Facteurs génétiques
Comme dans de nombreuses maladies auto-immunes, il existe une forte association de certains allèles HLA avec la maladie, notamment l’haplotype HLA-DR2, retrouvé chez près de 80 % des patients. Par ailleurs, certains allèles, bien que courants dans la population générale et fréquents dans d’autres maladies auto-immunes, ont été identifiés comme fortement corrélés à la maladie, tels que HLA DRB1*1501 et DRB1*0401. D’autres semblent au contraire protecteurs, comme l’HLA DRB1*07. La distribution
Présentation clinique
La présentation classique de la maladie caractérisée par un syndrome pneumo-rénal concerne 60 à 80 % des patients, alors que 20 à 40 % des patients présentent une glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP) isolée et moins de 10 % des patients présentent une atteinte pulmonaire isolée [27]. Le diagnostic est porté devant l’association d’un tableau clinique compatible et la détection d’anticorps anti-MBG circulants par ELISA ou immunofluorescence indirecte, et/ou fixés le long de la MBG sur
Diagnostic biologique de la maladie de Goodpasture
Le diagnostic repose sur la recherche d’isotype IgG1 anti-membrane basale glomérulaire circulants. Leur recherche est un examen-clé du diagnostic et doit être réalisé dans les 24 heures suivant l’admission pour limiter tout retard diagnostique. Le diagnostic peut être fait par immunofluorescence indirecte (IFI) ou par ELISA. Les tests ELISA présentent une meilleure sensibilité (> 90 %) et une plus grande spécificité (> 95 %) que l’IFI. Il convient de répéter le dosage en cas de prélèvement
Particularité des patients ANCA positifs
La coexistence d’anticorps anti-MBG et d’ANCA, ou « double positivité », est plus fréquente que ne le suppose le hasard, avec des taux variant entre 21 et 60 % [37], [38]. Les ANCA de spécificité anti-myéloperoxydase (MPO) prédominent, caractérisées chez 66 à 81 % chez patients double-positifs [39], [40]. Le mécanisme de cette association n’est pas connu. Certaines observations ont montré que les ANCA pouvaient être détectés avant l’apparition de la maladie à anticorps anti-MBG, suggérant que
Prise en charge thérapeutique
Le traitement standard repose sur l’élimination des auto-anticorps circulants par échanges plasmatiques (EP) et un traitement immunosuppresseur par corticothérapie et cyclophosphamide (CYC). Cette thérapie combinée décrite pour la première fois en 1976 [46] reste le traitement de référence de première ligne. Une large étude chinoise en 2011 a confirmé que la thérapie combinée était associée à un bénéfice sur la survie globale (hazard ratio (HR) = 0,31 ; p = 0,001) et la survie rénale (HR = 0,60 ; p =
Rechutes
La maladie des anti-MBG est habituellement de début brutal, sévère et monophasique. Cependant, des rechutes sont observées dans 3 à 10 % des cas. Celles-ci peuvent survenir dans des délais très variables après l’épisode initial, dans les jours, les mois, voire les années suivant le diagnostic, rendant parfois la distinction difficile entre une aggravation initiale de la maladie et une rechute vraie. Les récidives sont fréquemment associées à la résurgence des anti-MBG circulants, la production
Conclusion
La maladie des anti-MBG est une maladie auto-immune archétypale, dans laquelle l’auto-antigène et l’auto-anticorps sont clairement identifiés. Il s’agit d’une maladie brutale, le plus souvent monophasique, sévère, grevée d’une lourde morbidité rénale et d’une mortalité. Concernant la prise en charge thérapeutique, la coordination de vastes études prospectives sur la maladie anti-MBG est rendue difficile par sa rareté et sa gravité. La thérapie combinée EP plus corticoïdes plus CYC reste le
Déclaration de liens d’intérêt
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références (59)
Landmark publication from The American Journal of the Medical Sciences: The significance of certain pulmonary lesions in relation to the etiology of influenza
Am J Med Sci
(2009)- et al.
Identification of the Goodpasture antigen as the alpha 3(IV) chain of collagen IV
J Biol Chem
(1988) - et al.
Anti-glomerular basement membrane antibody-induced glomerulonephritis
Kidney Int
(1973) - et al.
Recurrent Goodpasture's disease
Am J Kidney Dis
(1996) - et al.
Recurrent glomerulonephritis after kidney transplantation
Am J Transplant
(2006) - et al.
Experimental autoimmune Goodpasture's disease: a pathogenetic role for both effector cells and antibody in injury
Kidney Int
(2005) - et al.
Regulation by CD25+ lymphocytes of autoantigen-specific T-cell responses in Goodpasture's (anti-GBM) disease
Kidney Int
(2003) - et al.
Clinical features and outcomes of anti-glomerular basement membrane disease in older patients
Am J Kidney Dis
(2011) - et al.
Susceptibility to anti-glomerular basement membrane disease is strongly associated with HLA-DRB1 genes
Kidney Int
(1997) - et al.
The role of HLA-DRB1 alleles on susceptibility of Chinese patients with anti-GBM disease
Clin Immunol
(2009)